Politique étrangère : Portée Manquante!

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MAKLe Ministère des Affaires Étrangères de tout pays demeure la vitrine par excellence de l’image que ce dernier veut projeter de lui-même au monde extérieur. Ce ministère est le conduit incontournable par le biais duquel sa politique interne et donc nationale est traduite pour être projetée et promue à l’extérieur. Au delà du prestige et de l’aura que ce portefeuille confère à celui ou celle qui le détient, il est impératif que cette personne soit capable d’évoluer dans et faire face à n’importe quelle situation sans perdre de vue la finalité de sa mission, c’est à dire, l’intérêt national de son pays.

Il est attendu du Ministre des affaires étrangères, plus que n’importe quel autre ministre, qu’il

maîtrise parfaitement ses dossiers et qu’il développe les qualités requises pour mener à bien ses

responsabilités. Au demeurant, il est l’interlocuteur privilégié de tout visiteur officiel venu tisser des

liens d’amitié ou diplomatique dans son pays.

Normalement, avec le Chef exécutif, c’est le Ministre des affaires étrangères qui détient le

pouvoir de signer au nom du pays tout instrument de coopération ou protocole d’accord

international. Tout autre ministre ou officiel qui est désigné pour signer un quelconque instrument

au nom du pays doit impérativement détenir un document signé du Chef exécutif ou du Ministre

des affaires étrangères, qu’on appelle dans le système international un Instrument de pleins

pouvoirs. C’est la même pratique qui est appliquée pour les représentations ministérielles dans les

conférences internationales.

C’est donc encore lui qui représente le pays dans les réunions internationales, mises à part

celles qui sont sectorielles. Normalement aussi, c’est lui qui est appeléà diriger les missions multi

ministérielles aux réunions intergouvernementales du point de vue protocolaire quand elles ne sont

pas au niveau des Chefs d’état ou de gouvernement.

Il est censé suivre de près tout développement qui peut avoir une incidence directe sur les

relations internationales, sur la paix et la sécurité mondiales, ou encore sur les intérêts nationaux

de son pays. Il est souvent appeléà prendre position dans le concert des nations, que ce soit au

niveau régional ou international.

C’est dire l’importance que revêt ce ministère dont le titulaire est communément référé comme

Chef de la diplomatie du pays qu’il représente.

Les Ministres des affaires étrangères, moyennant leur performance, ont l’avantage d’être connus

et reconnus sur la scène mondiale et sont souvent désignés pour assumer des responsabilités

internationales. Les exemples les plus en vue sont ceux qui sont à la tête des organisations

régionales, telle que L’Union africaine, où Madame Zuma, précédemment Ministre des affaires

étrangères de l’Afrique du Sud est la présidente de la Commission ou encore l’Organisation des

nations unies où M. Ban ki Moon, anciennement Chef de la diplomatie de la Corée du Sud, en est

le secrétaire général. Plus près de chez nous, le secrétaire général de la COI, Jean Claude de

l’Estrac a, entre autres, été ministre des affaires étrangères de Maurice.

Maurice a eu la chance d’avoir certains titulaires à ce poste qui ont fait honneur au pays, mais

nous avons aussi eu d’autres qui n’ont guère brillé et sont passés presque inaperçus.

Ce qui est aussi vrai, c’est que notre pays a suivi une politique étrangère constante, à quelques

nuances près, depuis son accession à l’indépendance.   Mais force est de constater que depuis l’avènement du présent régime, nous semblons pâtir

d’une absence totale dans les forums internationaux. Le prestige dont jouissait Maurice dans le

concert des nations semble s’effriter de jour en jour.

La cacophonie que connaît notre pays ces derniers mois, au niveau de nos gouvernants, a une

incidence indéniable sur l’ensemble de notre population. Le secteur public n’est pas épargné. Le

grain de sable est dans la machinerie et elle n’est pas loin d’être paralysée.

Ainsi, le ministère des affaires étrangères s’est vite retrouvé dans une situation, pour dire le

moindre, lamentable. Plus personne ne savait quelle direction prendre. Le personnel pourtant

qualifié et capable de faire montre d’une efficacité digne et louable, l’occasion se présentant, a pâti

dans une frustration sans précédent, à tel escient que le ministère a été réduit en boîte postale.

Qui plus est, l’absence totale du précédent chef de la diplomatie sur des dossiers importants pour

notre pays a été tellement criarde, que certains de ses collègues n’ont pas hésité, avec impunité et

sans gêne aucune, à faire des incursions maladroites et intempestives dans des domaines qui

relèvent exclusivement de la compétence de son ministère. Les dernières en date étant les

déclarations et prises de position irréfléchies de notre Sheikh national dans les conflits du Golfe!

Un Ministre des affaires étrangères digne de cette responsabilité, est souvent appelé, en cas de

blocus dans certaines négociations techniques et délicates, à s’y mettre pour user de son influence

et de ses qualités en vue d’un assainissement de la situation et d’une sortie de crise honorable

pour les parties concernées. Or, le dossier de non double-imposition avec l’Inde (DTAA), qui dans

un passé pas très lointain était géré par le Ministère des affaires étrangères, est passé sous

d’autres autorités sans une explication quelconque.

Le passage récent chez nous d’une officielle de haut niveau du département d’état américain

(affaires étrangères) a été presqu’un non-event. En cette année 2016, où l’accord entre la Grande

Bretagne et les États Unis d’Amérique sur l’archipel des Chagos, dont nous revendiquons, à juste

titre, la souveraineté, va être reconduit pour une période de vingt ans, pas un mot n’a été dit sur

cette question primordiale pour nous par le Ministre en question. Au contraire, à question posée, il

semblerait qu’il aurait dit que ce dossier relevait du Bureau du Premier Ministre. Alors là, quel aveu

de taille ou devrait-on dire quel désaveu?

La même chose s’agissant du dossier ‘Tromelin’ sur lequel nous sommes en litige avec La

France. Pas une seule action concrète n’aurait été entreprise.

Les échos qui nous parvenaient des autres départements tombant sous sa responsabilité

ministérielle n’étaient guère plus positifs! Que ce soit au niveau du département du commerce

international ou de celui de l’intégration régionale, le moteur paraissait grippé.

Et encore, n’a t-on pas vécu tout récemment la posture malheureuse de Maurice vis à vis des

Comores sur la question des Jeux des Îles? Ce pays, membre, comme nous, de la COI, s’est senti

humilié par le traitement qui lui a été réservé. Est- ce que le Ministre avait pris conscience de

l’ampleur du dégât relationnel que ce malencontreux agissement pourrait avoir entre deux pays

frères et le malaise qui pourrait envelopper toute la sous-région? On pourrait continuer sur cette

sortie ad infinitum.

Mais les événements politiques de ces derniers jours dictent autrement. Ainsi, c’est avec un

grand ouf de soulagement, des plus sonores, qui vient de certains étages du Newton Tower où se

casent, malheureusement, les bureaux du Ministère des Affaires Étrangères, que l’on a appris, au

courant du lundi14 mars, un changement de mannequin dans la vitrine du pays sur le monde! Les

ides de mars avaient de nouveau frappé! Est-ce que le nouveau titulaire sera à l’ écoute des professionnels du Ministère dont les qualités

ont jusqu’ici été ignorés par son prédécesseur? Est-ce qu’il saura faire le ménage dans nos

missions diplomatiques pour rendre celles-ci performantes et répondre adéquatement aux attentes

et objectifs du pays? Est-ce qu’il aura le courage nécessaire de déplacer les locaux de son

ministère dans un lieu plus digne, plus serein, loin des magasins de chaussures, de lingeries et autres bureaux de voyage?

On le souhaite vivement!

Vijay Makha

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