Mort? Vite, la tisane! – Le Militant

Le patient était au bloc opératoire. Le débat faisait rage depuis quelque temps déjà: allait-on le maintenir sous respiration artificielle ou couper le cordon ombilical qui le reliait à la grande famille d’outre-Manche? Vous l’aurez compris. Il s’agit du référendum du jeudi 23 juin au Royaume Uni. L’enjeu de ce référendum était de taille, pour les britanniques, les 27 autres États membres de l’Union européenne (UE), mais aussi pour tous ces pays qui sont liés de façon directe ou indirecte à la Grande Bretagne par le truchement des arrangements conclus avec l’UE.

 

Les répercussions de la victoire du Brexit (Britain exit) de l’UE étaient immédiates. À peine le premier pointage annoncé dans la soirée du 23 juin, les marchés mondiaux devenaient fiévreux. Les retombées négatives allaient se corser davantage au fil des heures. La livre sterling affichait un taux d’échange des plus bas depuis 1985. Les marchés boursiers, de par le monde, s’effondraient et les inquiétudes dans le monde commercial international ne faisaient que s’agrandir face à l’incertitude qu’occasionnerait un tel exit. Déjà le 24 juin, les actions, en bourse, des compagnies britanniques les plus en vue s’affolaient avec une perte de 120 milliards de livres sterling. De plus, en 24 heures, le marché international affichait une perte de 2 mille milliards de dollars américains! D’autre part, les réactions au sein de l’UE ne se faisaient pas attendre. Alors que les États européens concernés exprimaient leur regret face à ce résultat éclaboussant, les partis d’extrême droite de la région se félicitaient de ce même dénouement. Il ne fait aucun doute que ces partis vont accentuer leur campagne pour la tenue de référendums similaires dans leurs pays respectifs balançant, entre autres, les épouvantails que représentent les questions de l’immigration/réfugiés et les pouvoirs décisionnels accrus de la Commission de l’UE à Bruxelles, aux dépens de la souveraineté des pays membres. D’ailleurs, ce sont ces questions, incluse « l’occupation des emplois » par les immigrés, qui ont motivé le vote quasi-émotionnel du 23 juin. La victoire était celle de la campagne de frayeur, menée tambour battant par les Boris Johnson et autres Nigel Farage. Martin Schulz, président du Parlement européen et Jean Claude Juncker, président de la Commission de l’UE, sont vite montés au créneau, pour donner la réplique au Premier Ministre Cameron, indiquant que l’UE ne saurait faire les frais des problèmes internes du Parti Conservateur Britannique et attendre Octobre (après l’installation d’un nouveau Premier Ministre à Londres) pour entamer la procédure du retrait. Les négociations, de leur point de vue, devraient débuter immédiatement. La Commission aurait déjà nommé celui qui,en son sein, négociera la sortie. À peine deux jours après ce séisme politique, le réveil se fait brutal pour les britanniques, ceux qui ont voté Brexit inclus. Constatant une déchirure et une division émergentes, un regain de racisme et, prenant conscience des conséquences de leur fait, ils sont près de 3 millions, ce dimanche matin, à avoir signé une pétition réclamant un nouveau vote; L’Ecosse se retrouve dans la logique d’un deuxième référendum pour son indépendance, vu qu’elle a voté à plus de 60% pour son maintien au sein de l’UE; l’Irlande du Nord, ayant voté de façon semblable, préconise l’unification avec son voisin du sud, la République Irlandaise; le Premier ministre Cameron a annoncé sa démission; le Parti Travailliste britannique fait face à une révolte interne qui pourrait déboucher sur la destitution de son leader, Jeremy Corbyn. Le vote du 23 n’est pas contraignant et le Parlement pourrait ne pas avaliser le Brexit, mais à ses risques et périls! Quel que soit le script du nouvel épisode dans cette affaire, un sentiment de méfiance voir de trahison plane! Et à Maurice? La chute de la livre sterling a déjà occasionné des pertes conséquentes. Nos exportations, hors taxes et hors quota, vers le Royaume-Uni pourraient souffrir devant l’incertitude du régime qui régirait nos échanges commerciaux à l’avenir, sans compter les incidences sur plusieurs autres secteurs. Mais voilà! Le 14 juin, le Premier Ministre, répondant de façon dérisoire à la PNQ de Paul Bérenger sur le Brexit, l’accusait de vouloir organiser les funérailles avant même l’annonce du décès. Dix jours après, la dépouille mortelle, déjà en état de décomposition comme constatée plus haut, se trouve sur les bras de Pravind Jugnauth qui, lui aussi, avait banalisé toute la question en disant, avec une légèreté proverbiale, que bientôt on devrait instituer un Comité pour étudier les conséquences d’un éventuel Président Trump aux États Unis! Quelle prévoyance, vous autres!

Vijay Makhan 26/6/2016

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